La brève juridique N°66

La brève juridique N°66 parue le 13 / 02 / 2020

 

Au menu de ce mois de février la commande publique doit se recycler, et se réinventer !

Il est temps de recycler, et cela passe d’abord par la publication de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et l’économie circulaire, puis par la volonté de recycler les textes européens avec un projet de loi « ASAP ». L’idée étant notamment d’exclure les services de prestations juridiques de conseils du champ des marchés publics.

Il est aussi temps de réinventer, et cela passe par l’existence d’un nouveau référé, le référé secret des affaires et par la refonte des CCAG. Mais pour les voir publiés, il faudra encore patienter… 

 

 

Il est temps de recycler….

 

…. avec la publication de la Loi « économie circulaire »

 

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire a été publié au Journal Officiel du 11 février dernier. Démonstration supplémentaire de la volonté de dynamiser la place du développement durable dans la commande publique.

Cette loi prévoit plusieurs dispositions en matière de commande publique. Sont notamment concernés les services de l’Etat, les collectivités territoriales et leurs groupements.

  • Réduire sa consommation, de plastiques et de déchets

Le texte indique que « dès que cela est possible », les acheteurs doivent réduire la consommation de plastiques à usage unique, et la production de déchets.

Ils doivent en outre privilégier les biens issus du réemploi ou qui intègrent des matières recyclées en prévoyant des clauses et des critères utiles dans les cahiers des charges.

Dans le cas particulier d’un logiciel, il est précisé qu’il convient de promouvoir le recours à des « logiciels dont la conception permet de limiter la consommation énergétique associée à leur utilisation ». Voilà l’illustration du concept « d’écoconception ». Reste à savoir ce que cela recoupe exactement…

  • Recycler : la spécificité des constructions temporaires

Dans ce cadre la loi précise que les acheteurs ne peuvent exclure les constructions temporaires ayant fait l’objet d’un reconditionnement pour réemploi, tant que leurs niveaux de qualité et de sécurité sont égaux à ceux des constructions neuves de même type. Il est également question de considérer les incidences énergétiques et environnementales de la construction sur toute sa durée de vie.

  • Déchetteries à disposition pour les produits en attente d’une seconde vie

Pour les acteurs de l’économie sociale et solidaire, les collectivités compétentes pour la collecte et le traitement des déchets des ménages doivent leur permettre, par contrat ou par convention, d’utiliser les déchetteries communales comme lieux de récupération ponctuelle et de retraitement d’objets en bon état ou réparables. Les déchetteries sont tenues de prévoir une zone de dépôt destinée aux produits pouvant être réemployés.

  • Recycler avec des produits issus du réemploi ou en réutilisation

Les biens acquis annuellement sont issus du réemploi ou de la réutilisation ou intègrent des matières recyclées dans des proportions de 20 % à 100 % selon le type de produit. Ces taux et les produits qu’ils concernent ont vocation à être définis par décret.

            Ces objectifs se positionnent à compter du 1er janvier 2021. Voilà un texte qui, comme dans sa rédaction, reste assez flou dans son application, et dans les moyens donnés pour remplir les objectifs annoncés.

LOI n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire

 

… avec le projet d’exclusion des prestations juridiques de représentation : as soon as possible

Un projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dont l’acronyme n’est autre que ASAP, se propose d’exclure les marchés de services de représentation juridique du champ d’application des marchés publics ; as soon as possible.

L’article 46 du texte a pour objet, comme cela est précisé dans l’exposé des motifs du texte, « d’assurer une transposition stricte des articles 10 de la directive 2014/24/UE et 21 de la directive 2014/25/UE du 26 février 2014 ».

Ce projet de loi impacte donc pour partie le droit de la commande publique, en excluant les marchés de prestations de services ayant pour objet la représentation légale d’un client par un avocat, et les prestations de conseil s’y attachant, du champ des marchés publics.

Pourquoi une telle exclusion ? Pour engager une simplification.

Il s’agit d’alléger les contraintes administratives et procédurales pesant sur les acheteurs passant ces marchés publics et sur les opérateurs économiques qui candidatent à leur attribution[1].

Ainsi, le projet prévoit de modifier l’article L.2512-5 du code de la commande publique listant les « autres marchés » et de le compléter par deux alinéas excluant ainsi :

  • Les services juridiques de représentation légale d’un client par un avocat dans le cadre d’une procédure juridictionnelle, devant les autorités publiques ou les institutions internationales ou dans le cadre d’un mode alternatif de règlement des conflits ;
  • Les services de consultation juridique fournis par un avocat en vue de la préparation de toute procédure visée à l’alinéa précédent ou lorsqu’il existe des signes tangibles et de fortes probabilités que la question sur laquelle porte la consultation fera l’objet d’une telle procédure.

Ce projet se propose ainsi de ne plus aller « au-delà de ce qu’exigent les engagements européens de la France »[2].

Côté calendrier, ce texte a été déposé en première lecture le 5 février dernier, et sera discuté en séance publique début mars. Affaire à suivre.

Projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dit projet de loi « ASAP »

 

Il est temps de réinventer…

…. Le secret, c’est une affaire de référé !

Un nouveau référé est né, le référé « secret des affaires ». Ou comment redynamiser ce que l’on nommait avant le secret industriel et commercial.

Un décret en date du 30 décembre dernier introduit une nouvelle forme de référé devant le juge administratif, le référé en matière de secret des affaires.

  • Un référé pour prévenir une atteinte au secret des affaires

Le juge peut ainsi être saisi lorsqu’il est question de « prévenir une atteinte imminente ou faire cesser une atteinte illicite à un secret des affaires ».

Rappelons à ce titre la loi du 30 juillet 2018 relative au secret des affaires. Est ainsi protégé au titre du secret des affaires, toute information ayant une valeur commerciale et un caractère secret, revêtant une valeur, effective ou potentielle, et faisant l'objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables pour en conserver le caractère non-public.

Pour protéger le secret des affaires des entreprises, le juge a été doté de pouvoirs importants.

  • Un pouvoir étendu du juge administratif

Il aura alors un pouvoir plutôt étendu dans la mesure où il sera en capacité de « prendre toute mesure provisoire et conservatoire proportionnée, y compris sous astreinte ».

Comme par exemple, interdire la réalisation ou la poursuite des actes d'utilisation ou de divulgation d'un secret des affaires ou encore interdire les actes de production, d'offre, de mise sur le marché ou d'utilisation des produits soupçonnés de résulter d'une atteinte significative à un secret des affaires. Ces cas cités non exhaustivement sont prévus par le code du commerce dans son article R.152-1.

Le juge pourra aussi « ordonner l’ensemble des mesures mentionnées à l’article R.152-1 du Code du commerce ».

Comme par exemple « autoriser la poursuite de l'utilisation illicite alléguée d'un secret des affaires en la subordonnant à la constitution par le défendeur d'une garantie destinée à assurer l'indemnisation du détenteur du secret ».

Les entreprises activent dans la commande publique pourront se saisir de ce nouveau référé pour défendre leurs intérêts en matière de secret des affaires.

Affaire à suivre donc !

Décret du 30 décembre 2019, réforme pour la justice et autres mesures relatives à la procédure contentieuse administrative.

 

….Refonte des CCAG, reporter pour mieux viser !

Aux termes de l’article R2112-2 du Code de la commande publique, « les clauses du marché peuvent être déterminées par référence à des documents généraux tels que : 1° Les cahiers des clauses administratives générales, qui fixent les stipulations de nature administrative applicables à une catégorie de marchés […] ».

Il existe à ce jour 5 CCAG (Travaux, PI, FCS, TIC et Marchés industriels), dont la dernière version majeure date de 2009.

Une décennie plus tard, il est question de leur remise à neuf !

Initialement prévue pour le printemps 2020, leur publication devra finalement attendre les premières feuilles de l’automne… Alors que nos équipes se tenaient à l’affût pour intégrer ces évolutions dans MarcoWeb !

Profitons de cette nouvelle pour vous rappeler les objectifs de la réforme.

 Il s’agit d’améliorer la lisibilité des CCAG, d’actualiser des clauses parfois obsolètes, et surtout de les adapter à l’air du numérique et de l’ouverture des données afin d’inciter les acheteurs à dématérialiser l’exécution de leurs marchés.

Il est également question de renforcer l’accès des PME à la commande publique. Bien qu’il reste encore à voir comment cela va se concrétiser, l’objectif est de faire des CCAG « un instrument de politique publique au service de l’accès des PME aux marchés publics et des achats durables ».

Autre point notable, la création envisagée d’un nouveau CCAG relatif à la maîtrise d’œuvre.

La DAJ nous en dit donc un peu plus sur le calendrier de la réforme.

Lors d’un colloque qui s’est déroulé le 6 février, le sous-directeur du droit de la commande publique à la DAJ a présenté l’état d’avancement des travaux, indiquant que les thèmes « harmonisation des clauses communes » et « prévention et règlement des différends » étaient en cours de finalisation. L’étude des autres thèmes, notamment la dématérialisation et l’exécution financière, se déroulera dans les semaines à venir.

Par ailleurs, une consultation publique sera organisée aux alentours du 15 juin, pour prendre fin au milieu de l’été. Par conséquent, la publication des nouveaux CCAG est désormais envisagée pour cet automne, avec une entrée en vigueur prévue au 1
 

[1] Voir le commentaire relatif à l’article 46 de l’exposé des motifs

[2] Point 53 de l’avis du Conseil d’Etat sur le projet de loi

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