La brève juridique N°67

La brève juridique N°67 parue le 12 / 03 / 2020

 

 

 

A une semaine des élections municipales, les nouvelles du monde de la commande publique se déclinent en un programme électoral ambitieux !

  • Des engagements en matière de développement durable :
    • Le ministre de l’économie et des finances évoque la possibilité d’insérer des critères alternatifs pour favoriser les entreprises au niveau local.
    •  L’Etat nous livre un inventaire à la Prévert de mesures devant impacter certaines de ces procédures.
  • Des promesses du lendemain : la première ébauche de la réforme des CCAG tant attendue pour l’automne[1] nous a été présentée.

 

Les engagements en matière de développement durable : une place pour le circuit court dans les marchés publics ?

« On le sait… sa façon d’être parfois vous déplaît… autour de ce critère le silence se défait… mais elle est, la préférence locale… ! »

Ah la préférence locale…  si Julien Clerc était un marché il aurait succombé à ce qui rompt les principes du CCP… 

Le Ministère de l’économie et des finances a été interrogé sur la possibilité d’instaurer dans la réglementation un mécanisme de préférence locale pour attribuer les marchés publics.  Selon l’auteur de la question, le gouvernement cherche à privilégier les circuits courts et à créer de nouvelles dynamiques d'activité dans les territoires, et ce, alors même que les acheteurs n’ont pas les outils pour privilégier les entreprises implantées localement dans l'attribution des marchés.

Peut-on modifier le CCP pour permettre la prise en compte d’un critère géographique dans les marchés ?

Le ministère rappel tout d’abord que les principes constitutionnels de la commande publique et les principes de non-discrimination et de liberté de circulation des personnes énoncés dans les traités de l’UE font obstacle à la prise en compte d'un critère géographique dans l'attribution des marchés publics.

Autrement dit, non le Code ne peut être modifié au risque de le rendre inconventionnel, le juge censure déjà les critères d’attribution reposant sur l’implantation géographique des entreprises.

La préférence du juge, ce n’est pas de préférence locale ! 

Ne restant pas sur cette négation, le ministère se veut positif en précisant ensuite que le CCP offre déjà des outils pour faciliter l’accès des entreprises locales.

Sont évoqués notamment le sourcing, ou encore l’allotissement pour favoriser les PME, ainsi que la possibilité de recourir à des mesures de publicités locales.

En outre, le ministère propose des critères alternatifs pour favoriser les entreprises au niveau local.

Il est effectivement possible de se fonder sur des critères tels que :

  • Le développement des approvisionnements directs
  • Les performances en matière de protection de l'environnement

Par exemple : apprécier la qualité des offres au regard de l'effort de réduction de gaz à effet de serre notamment pour le transport des fournitures ou les déplacements des personnels

  • La rapidité de l’intervention d’un prestataire

Ces critères devant quoi qu’il en soit rester justifiés au regard du marché public.

Comme pour clore le débat la réponse termine avec le rappel des mesures prises pour faciliter l’accès des PME à la commande publique (augmentation du seuil à 40 000€ HT, élaboration du guide « Favoriser l'approvisionnement local et de qualité en restauration collective » et « Guide pratique pour faciliter l'accès des TPE/PME à la commande publique » élaboré par l’OECP). Alors quel « outil » à votre préférence ? 

QR, n°24524 publiée au JOAN du 25 février 2020, page 1485

 

Des actions à mener : l’insertion de clauses types

Mme Duvignères, comment est votre circulaire, est-elle règlementaire ? La célèbre décision du 18 décembre 2002 permet de revenir sur la distinction entre circulaire à caractère impératif et les circulaires interprétatives. Le texte du 25 février relatif aux engagements de l’Etat pour des services publics écoresponsables est à ranger dans la première catégorie.

Une quinzaine de jours après la parution de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire[2], le gouvernement poursuit le virage vert annoncé pour cette seconde moitié de quinquennat. Le texte prévoit un « socle d’actions obligatoires » concernant les acteurs publics à des degrés variables.

Voici le périmètre du nouveau dispositif :

  • Les acteurs contraints : l’ensemble des établissements publics et opérateurs de l’Etat.
  • Les acteurs volontaires : les collectivités territoriales, leurs groupements ainsi que les hôpitaux.

Socle d’actions obligatoires et impact sur les marchés :

Divers domaines sont évoqués au sein de ces actions obligatoires : mobilité des agents, réduction de la consommation d’énergie dans les bâtiments publics, suppression des produits phytopharmaceutiques, recours à l’économie circulaire et la maîtrise de l’empreinte carbone du numérique. Certaines mesures pourraient avoir un impact direct sur certains marchés :

  • Mesure 10 : dès janvier 2021, lors du renouvellement de ses marchés, l’État intègre dans ses appels d’offres des dispositions sur la prise en compte du risque de déforestation (…). Afin d’accélérer cette transition, l’État rédigera des clauses-types pour accompagner les acheteurs publics et sécuriser leurs procédures de passation de marchés.
  • Mesure 12 : lors du renouvellement des marchés et à compter de juillet 2020,
  • l’Etat et ses établissements publics mettent en œuvre, en avance par rapport à l’échéance fixée par la loi, les objectifs d’approvisionnement en produits de qualité et durables (au moins 50 % dont au moins 20 % de produits issus de l’agriculture biologique) dans leurs services de restauration collective et dans leurs prestations de frais de bouche. Ils affichent et suivent au moins une fois par an la part de ces produits dans les repas servis dans leurs restaurants collectifs. Ils favorisent la qualité et la diversité des apports protéiniques.

PS : Agents de la fonction publique d’Etat, enfourchez votre bicyclette, la première mesure prévoit l’octroi d’un forfait mobilité durable !

Circulaire du 25 février relative aux engagements de l’Etat pour des services publics écoresponsables

Les promesses de la réforme des CCAG : les éléments transverses :

La cellule actualité juridique participe au groupe de travail relatif à la refonte des CCAG. Nous vous proposons de faire le point sur les éléments transverses impactant l’ensemble des CCAG qui ont pour l’instant étaient posés sur la table. 

  • Références à plusieurs CCAG :

Les préambules de certains CCAG (TIC-MI-PI) prévoient l’obligation pour les acheteurs de ne faire référence qu’à un seul CCAG dans leurs marchés publics. La réforme prévoit de supprimer cette interdiction.

  • Clause de propriété intellectuelle (PI) commune :

Il est proposé d’appliquer une clause de propriété intellectuelle à tous les CCAG selon une rédaction uniforme, de clarifier certaines définitions, de simplifier le régime d’utilisation des résultats en tenant compte de la spécificité des connaissances extérieures. La plupart des contributeurs ont souligné le caractère général des problématiques de PI et la nécessité de disposer d’une clause applicable dans tous les marchés. Il est proposé de fusionner l’option A et l’option B en un régime autoporteur : le régime par défaut serait une cession de droits non exclusive (ancienne option A) avec les possibilités d’expliciter les finalités d’utilisation dont l’acheteur a besoin (ancienne option B).

  • Taux minimum d’avance :

Il est proposé de fixer un taux d’avance supérieur au taux minimum prévu par le code de la commande publique. Pour les acheteurs défavorables, la fixation d’un tel taux aboutirait à une multiplication des dérogations à cette stipulation et aurait pour effet de placer certains d’entre eux, et notamment les plus petites collectivités qui oublieraient de prévoir une telle dérogation, dans une situation financière difficile. 

  • Pénalités de retard :

Il est proposé de généraliser une mise en demeure préalable. Cette proposition a fait l’objet de fortes réserves de la part des acheteurs. Pour les auteurs de la proposition, cette dernière est essentielle pour rééquilibrer les relations contractuelles et favoriser le dialogue entre l’acheteur et son cocontractant. L’idée sous-jacente étant de conduire les parties à échanger entre elles pour comprendre les causes du non-respect des délais d’exécution par le cocontractant, permettant ainsi de trouver des solutions appropriées à des difficultés d’exécution de la prestation.

  • Silence vaut accord :

Afin de renforcer l’équilibre des relations contractuelles et d’éviter les situations de blocage dues à un silence prolongé de l’acheteur, il est proposé d’introduire une nouvelle décision implicite d’acceptation, lorsque l’acheteur ne répond pas aux observations du titulaire à la suite de la notification d’un bon de commande.

  • Règlement des litiges / contradictoire :

Afin de prévenir la survenance de litiges et de contentieux souvent longs et coûteux, il est proposé de développer le dialogue entre les parties en instituant davantage de contradictoire dans les CCAG, et cela dans le but de renforcer la confiance et la transparence entre les acheteurs et les titulaires.

Les éléments liés au nouveau CCAG MOE

  • La consécration du BIM (Building Information Modeling) : ajout de la définition du cahier des charges BIM pour traduire dans le CCAG les avancées du Plan de transition numérique du bâtiment.

 

  • Les éléments propres à la cotraitance :

 

→ Paiement = Pour les paiement le principe est inversé par rapport au CCAG Prestations intellectuelles. Le principe serait désormais, quel que soit la forme du groupement qu’il soit conjoint ou solidaire, est de faire un paiement sur compte séparé. (Principe = paiement sur compte séparé / Exception = paiement sur compte unique).

→ Répartition des pénalités = Ajout d’un nouvel article pour reprendre clairement dans le CCAG les règles de répartition des pénalités en cas de groupement. Les pénalités sont réparties entre les cotraitants conformément aux indications données par le mandataire, dans l'attente de ces indications, les pénalités sont retenues en totalité au mandataire[1].

  • La valorisation des marchés à tranches : Il est proposé, dans un souci d’équilibre des relations contractuelles, de prévoir des indemnités de dédit et d’attente. Une précision relative aux marchés à tranches a également été ajoutée sur l’article relatif aux prolongations de délai pour prévoir le cas où on est sur des tranches optionnelles avec dédit et attentes.
  • Les rapprochements avec le CCAG travaux :

 

→ Pièces contractuelles : Il paraît nécessaire d’imposer au maître d’œuvre d’exercer ses missions dans le respect des stipulations du CCAG-Travaux détaillant son rôle vis-à-vis des titulaires de marchés de travaux. Il est donc proposé de rendre ces clauses contractuelles, sans pour autant rendre l’ensemble du CCAG-Travaux contractuel. On retrouve donc en pièce contractuelle « les clauses du CCAG-Travaux précisant le rôle du maître d’œuvre dans le cadre des marchés de travaux ».

→ Début d’exécution : A l’instar de ce qui est prévu par le CCAG-Travaux, il est proposé de prévoir l’hypothèse du démarrage des prestations à compter d’un Ordre de Service (OS) par défaut, mais toujours possible de faire à partir de la notification si cela est indiqué dans le marché (le CCAG PI prévoit quant à lui que le délai part de la notification).

→ Décompte général : Ajout d’un nouvel article par rapport au CCAG PI qui prévoit l’établissement d’un décompte général comme en matière de marchés de travaux. (Reprise de l’essence de l’article 13.4 du CCAG Tvx, sauf que là c’est l’acheteur et non plus le maître d’œuvre qui établit le décompte)

→ Interruption des prestations : Ajout d’un nouvel article. Se rapproche de l’article 49.2.1 du CCAG-Travaux. Dans un souci d’équilibre des relations contractuelles, il est proposé de donner la faculté au maître d’œuvre d’interrompre la prestation lorsqu’il est confronté à un retard de paiement de 3 mois.

  • La reprise de certaines clauses de la MIQCP (Mission Interministérielle pour la Qualité des Constructions Publiques) : D’une part, concernant l’article 20 du CCAG-PI sur l’arrêt d’e l’exécution des prestations, la MIQCP prévoit dans ce cas une indemnisation. D’autre part, concernant l’équivalent de l’article 25.1 du CCAG PI relative aux droits de l’acheteur et des tiers désignés dans le marché, la rédaction proposée par la MIQCP est reprise.

 

  • Les autres éléments notables :

 

→ Suppression de l’option B concernant les droits de propriété intellectuelle : L’option B du CCAG correspondant à la cession des droits patrimoniaux ne devrait pas être retenue en matière de maîtrise d’œuvre. La concession prévue par l’option A est suffisante et économiquement pertinente pour la maîtrise d’ouvrage, et plus protectrice pour la maîtrise d’œuvre.

→ Rejet et résiliation : Il est proposé, en cas d’un second rejet des prestations de ne pas demander à nouveau la présentation des prestations au titulaire et de procéder à une résiliation pour faute, dès lors que ce dispositif aurait une incidence importante sur les délais de l’opération dans son ensemble.

→ Révision des prix avec formule proposée : Compte tenu de la durée des marchés de maîtrise d’œuvre et des aléas majeurs auxquels ce type de marché est soumis (variations de l’index ING), le principe de la révision des prix doit être retenu par principe. Avec proposition d’une formule de révision des prix. C = 0,125 + 0,875 Im/Io avec l’index ING.

Tous ces éléments nous donnent donc une vision globale de ce à quoi ressemblera le futur CCAG MOE. Il reste que ces éléments sont à l’état de projet et que les échanges sont toujours en cours.

 

1- CE, 02 décembre 2019, Société Serin Constructions, n°422615

2- CF Brève février

3-LOI n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire ; https://blog.achatsolutions.fr/loi-economie-circulaire-il-est-temps-de-se-recycler/

 

 

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