Clone de La brève juridique N°72

La brève juridique N°71 parue le 16 / 07 / 2020

 

 

La commande publique doit désormais gérer la phase « post-crise sanitaire » ou du moins considérer la volonté de relance économique.

Cela se traduit dans les marchés de travaux par les demandes nombreuses d’indemnisations des opérateurs économiques, une circulaire vient préciser quelque peu le cadre à donner en la matière. Dans la même dynamique, deux textes du 17 juin dernier intègrent de nouvelles mesures pour soutenir les entreprises et notamment les PME particulièrement touchées par cette crise. 

 

1ère étape : éclairer les acheteurs sur la reprise des chantiers et la prise en charge des surcoûts

 

Afin d’éclairer quelque peu les acheteurs sur les dispositions à adopter en matière de prise en charge par la maitrise d’ouvrage d’une partie des surcouts directement induits par la crise sanitaire le gouvernement a publié une circulaire en date du 9 juin 2020.

 

Ce texte qui était finalement très attendu ne concerne que la reprise des marchés publics de travaux publics ou de bâtiment conduits sous maîtrise d’ouvrage de l’Etat. Toutefois tous les acheteurs peuvent s’en inspirer…

 

Le maitre mot est la conciliation, le texte vise clairement à limiter les procédures contentieuses ultérieures. A ce titre, la médiation des entreprises peut aider à trouver des solutions rapides et opérationnelles. La circulaire précise toutefois que pour les chantiers ayant déjà repris et ayant déjà fait l’objet de concertation il n’est pas question de revenir sur ces discussions.

 

Afin de donner quelques directions le gouvernement invite finalement les services de l’Etat à mettre en place un « dispositif formalisé de concertation » avec les entreprises afin d’évaluer les surcoûts liés à la fois : 

•          À la période d’interruption des chantiers

•          Aux nouvelles modalités d’exécution des chantiers sur la base des préconisations du guide OPPBTP.

 

Concernant les surcouts liés à la période d’interruption ceux-ci sont liés à la nécessité de :

•          Prolonger le délai contractuel d'exécution du chantier de manière à neutraliser la période d'interruption et renoncer à toute pénalité de retard.

•          Faire chiffrer les couts directs d’interruption correspondant aux mesures de mise en sécurité du chantier, de démobilisation du matériel, de gardiennage… dès lors qu’elles sont « raisonnables et justifiées ».

•          Procéder à un paiement rapide dans tous les cas

 

Concernant ensuite les surcouts liés aux nouvelles modalités d’exécution du chantier ces derniers peuvent se traduire par : 

•          Des coûts directement liés aux mesures sanitaires pouvant être déjà chiffrés;

•          Des coûts liés à des pertes de rendement, voire à des surcoûts,

•          D’approvisionnement, plus difficiles à chiffrer et susceptibles d'évoluer dans le temps;

•          Et un impact sur le calendrier d'exécution du chantier.

 

La circulaire précise que doit être mené un travail collectif et collaboratif par l'ensemble des parties prenantes. Le but étant d’objectiver ces éléments, de maîtriser et de limiter les impacts financiers et de calendrier. Il faut compenser, autant que faire se peut, ces impacts négatifs par des mesures d'organisation ou des économies ne portant atteinte ni à la sécurité sanitaire ni à la qualité globale de l'ouvrage.

 

→ Le texte ne pose pas d’obligation absolue de prise en charge des surcoûts : tout repose sur la négociation, et sur le devoir d’exemplarité.

          

Il convient de noter que finalement ce dispositif d’accompagnement est plus incitatif que contraignant…

 

Sans surprise, les services de l’Etat sont également invités à faire usage de la possibilité ouverte par l’ordonnance 2020-319 du 25 mars 2020 de majorer le montant des avances forfaitaires.

 

Aussi, la circulaire précise de veiller d’autant plus aux offres anormalement basses (OAB). En effet, il est indiqué que du fait de la crise certaines entreprises pourraient, malgré les mesures prises pour en atténuer l'impact, se trouver dans une situation financière précaire, pouvant les inciter à chercher à emporter « à tous prix » des appels d'offres. Cela pourrait les conduire à présenter des offres « hors marché » et les prix alors proposés ne reflèteraient pas la réalité des coûts et pourraient mettre en danger la bonne réalisation des prestations correspondantes.

 

Enfin, la circulaire indique la prise en compte et l’intégration nécessaire, dans les futurs appels d’offres du risque de pandémie. Cela traduit un double objectif ; garantir l’égalité de traitement des candidats, et assurer une juste rémunération du titulaire garantissant la sécurité des intervenants.

 

Doit-on en déduire qu’à l’avenir, les difficultés d’exécution qui pourraient trouver leur cause dans une nouvelle épidémie de covid19 devront être traitées dans le cadre des stipulations contractuelles et du droit commun ? Les acteurs de la commande publique ne devant plus compter sur des dispositifs exceptionnels ou la théorie de la force majeure…

 

 

Circulaire du 09 juin 2020, prise en charge des surcoûts liés à l'épidémie de covid19 dans le cadre de la reprise des chantiers de bâtiment et de travaux publics exécutés au titre de marchés publics de l'Etat soumis au chapitre Ier du Titre Ier du livre I de la première partie du code de la commande publique.

 

2ème étape : Assouplir les règles de passation pour soutenir les entreprises en difficultés

Publiés le 17 juin, une ordonnance et une loi viennent apporter un peu de souplesse à la commande publique pour faire face à la crise.

  • L’ordonnance n°2020-738 portant diverses mesures en matière de commande publique
  • La loi n°2020-734 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire.

Dans ce contexte « post crise » ou, du moins, de volonté de relance économique, le gouvernement entend soutenir les entreprises et notamment les PME particulièrement fragilisées par cette crise.

→ Un assouplissement pour la candidature des entreprises en difficultés

Le code de la commande publique prévoit que sont exclues de la procédure de passation des marchés les entreprises admises à la procédure de redressement judiciaire et qui ne justifient pas avoir été habilitées à poursuivre leurs activités pendant la durée prévisible d’exécution du marché.

L’article 1 de l’ordonnance revient sur cette disposition et l’assouplit, permettant ainsi aux entreprises qui bénéficient d’un plan de redressement à se porter candidates aux contrats de la commande publique. Ces dernières ne peuvent être exclues pour ce motif de redressement judiciaire. Il semble ainsi que cette disposition ne considère plus la condition de la durée d’exécution du marché.

La loi du 17 juin prévoit dans son article 38 - unique article à intéresser la commande publique - qu’un acheteur ne pourra pas résilier de manière unilatérale un marché public au seul motif que le titulaire est admis à la procédure de redressement judiciaire.

→ Un dispositif en faveur des PME pour les contrats globaux

En général, pour favoriser l’accès des PME à la commande publique, on met en avant l’allotissement. Cette fois il est question de l’exception. En effet, l’article 2 de l’ordonnance prévoit que tous les contrats globaux (conception-réalisation, marchés globaux de performance et marchés globaux sectoriels) - qui font exception au principe d’allotissement -  doivent prévoir une part minimale de l’exécution du marché que le titulaire s’engage à confier directement ou indirectement à des PME ou à des artisans. Cette part minimale est d’au moins 10% du montant prévisionnel du marché. La part du marché qui doit être confiée à une PME doit en outre faire l’objet d’un critère d’attribution.

Le rapport au président de la République qui accompagne cette ordonnance précise que la période de relance de l'économie après l'épidémie de covid-19 pourrait s'accompagner d'un fort recours à des marchés de ce type. Etendre ce critère à l'ensemble des contrats globaux du CCP permettrait de soutenir les PME fragilisées par cette crise en leur facilitant l'accès à ce type de contrat.

Ces dispositions sont applicables pour un an suivant la fin de la période d’état d’urgence sanitaire, soit jusqu’au 10 juillet 2021.

→ La baisse du chiffre d’affaires issue de la crise sanitaire ne doit pas être prise en compte

Dans le cadre de l’examen des candidatures, et notamment de la capacité économique et financière des entreprises, l’ordonnance dans son article 3 dispose que les acheteurs ne doivent pas tenir compte de la baisse du chiffre d’affaires intervenue au titre du ou des exercices sur lesquels s’imputent les conséquences de la crise sanitaire.

Cette dernière disposition s’applique jusqu’au 31 décembre 2023.

Ordonnance n°2020-738 du 17 juin 2020 portant diverses mesures en matière de commande publique / Article 38 de la Loi n°2020-374 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne

 

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